Notes de séjour - Salvador de Bahia 2012

Les circonstances

Deux membres d'EduSaT - Cécile et Roger - accompagnés de Raffaela, qui désire faire partie de notre association, ont séjourné à São Cristovão du 25 août au 5 septembre 2012. Nous étions les hôtes de la communauté franciscaine de Béthania, qui s'est installée à l'automne 2010 dans cette banlieue de Salvador de Bahia qui jouxte la favela de ce nom.

La communauté projette de créer une filière complète de prise en charge des jeunes, de l'âge de 6 mois à la formation professionnelle inclusivement et de construire un hôpital pédiatrique.

La première étappe envisagée est la réalisation d'un bâtiment pouvant abriter la crèche et le jardin d'enfants, pour accueillir des enfants de 6 mois à 6ans, jusqu'à l'âge de la scolarité obligatoire.

Ce voyage avait pour but de nouer des contacts avec les membres de cette communauté, de nous informer de l'état du projet, et de discuter d'un séjour futur de jeunes étudiants en musique genevois, élèves de Cécile, qui souhaitaient participer à des activité de construction et d'échanges culturels avec les jeunes de l'endroit.

Nos impressions lors du séjour

Favelas

Impressions mitigées dans les favelas. Les infrastructures et services essentiels sont disponibles : eau, électricité, voirie. Chaque foyer a l’accès au computer et à la télévision (possibilité d’ouverture à l’ information ).

Pauvreté, certes, mais sans commune mesure avec le Burundi ou l’Inde: les Brésiliens plaisantent en disant qu’ils ont les plus riches favelas du monde: chaque habitation a un toit et une porte et des grilles de protection.

Pas de sentiment d’insécurité lors de nos visites - en plein jour - accompagnés par un animateur de la paroisse. Cependant, dans la rue, certaines personnes refusaient le contact du regard. Les gens de la communauté ne s’aventurent pas le soir dans certains des quartiers, où, selon eux, la guerre des gangs fait périodiquement des victimes.

 Nous entendons régulièrement des pétarades, censées annoncer l’arrivage de la drogue dans les quartiers et malheureusement aussi des coups de feu !

La religion tient une place importante dans la vie quotidienne des brésiliens. On voit des églises de toute obédience lors de nos déplacements en bus. La religion traditionnelle du candomblé a systématiquement son espace de culte – le terreiro – à côté d’une église catholique. Les adeptes du candomblé – religion syncrétique - participent aussi aux cérémonies catholiques.

 Les religieux sur place sont effarés de la dégradation morale de la population pauvre des favelas (drogue et prostitution: les parents vont jusqu’à prostituer leurs enfants pour l’argent de la drogue). L’église catholique s’implique activement dans le soutien social materiel et dans l’éducation morale et religieuse de la population des favelas. Cette population respecte les religieux portant l’habit, même dans les quartiers les plus dangereux. Cependant, lorsque la guerre des gangs rend les quartiers impraticables (balles perdues) les religieux sont avertis des hostilités et évitent de s’y rendre.

Les crèches et jardins d'enfants des favelas

Dans les crèches visitées - dont une au fonctionnement subventionné par des brésiliens aisés, une autre dépendant de dons d’Italie (plaque de remerciements aux donateurs), nous avons perçu de l’inquiétude au sujet des financements venant d’une Europe en crise. Les dons parvenant tous les six mois, il n’y a pas de sécurité à long terme. Pour pallier aux difficultés financières, un

travailleur social que nous avons rencontré nous a expliqué qu’il donnait une partie de son salaire pour payer les charges de la crèche.

L’encadrement est assuré par 1 à 2 éducatrices et 1 cuisinière.

Les enfants des crèches ont en général de 3 à 4 ans.

Nous avons été surpris de voir leur propreté. Ils sont vêtus d’un uniforme. A un endroit, les enfants prenaient leur collation devant la télé. Dans d’autres espaces, il y avait des livres pour enfants, du matériel de dessin, des jeux etc.

Les enfants sont accueillis dans les crèches de 7 à 16 h et prennent 5 repas et collations pendant ce temps. Ils sont douchés et ont une heure de sieste après le repas.

Pour la sécurité des enfants, la crèche se trouve dans une enceinte fermée à clef. Une des crèches dispose d’un petit patio qui est destiné à devenir un espace de jeu. Les douches sont installées et servent à rafraîchir les enfants quand il fait trop chaud – la température varie de 26 à 32 °C suivant la saison.

Tous les samedis, une consultation sanitaire gratuite pour la population a lieu dans les locaux de la crèche.

Jardin d'enfants de São Cristovão

Au centre paroissial de Sao Cristovao, les enfants de l’école maternelle ont de 4 à 6 ans (exceptionnellement plus jeunes). Ces enfants sont répartis sur deux classes. L’initiation à la lecture, à l’écriture et au calcul est assurée par une monitrice et une aide-monitrice.

Les enfants sont accueillis de 8h à 11h et ne prennent que le repas de midi sur place.

L’après-midi, les locaux sont utilisés pour des formations professionnelles et artistiques destinées aux jeunes adultes.

Le centre comprend des locaux qui offrent des consultations juridiques; les conseillers peuvent représenter les plaignants devant les instances officielles.

Le centre est en train de mettre en place une consultation pédiatrique. Un dentiste et un labo d’odontologie ainsi qu’un service gynécologique sont en activité. Ces services (juridiques et sanitaires) sont en principe gratuits.

Solidarité et initiative personnelle

Les favelas sont situées à proximité immédiate d’immeubles occupés par des gens de classe aisée. Mais, au Brésil, la solidarité inter-classes n’est pas dans la mentalité: on donne volontiers des objets dont on n’a plus l’usage, mais on ne donnera pas volontiers de l’argent. D’une part personne ne souhaite financer la consommation de drogue, d’autre part la corruption des fonctionnaires est au Brésil une réalité qui décourage le développement de l’aide sociale. Seules des relations personnelles de confiance donnent l’assurance que les dons seront reçus par les institutions auxquelles ils sont destinés.

Il n’y a malheureusement pas de continuité dans la politique sociale .En effet, il n’est pas rare que des projets sociaux soient mis en place dans le cadre d’une campagne électorale, et que le support financier s’évapore dans les deux ans qui suivent. Très souvent, les travailleurs sociaux impliqués dans ces projets donnent de leur temps ou recherchent activement des fonds pour maintenir la structure à laquelle ils croient.

Initiative: le groupe de capoeira à Itapua

Nous avons été témoins d’une démonstration d’un groupe de capoeira qui se trouve dans cette situation.

L’Etat a construit un local pour développer cette activité et apporter aux jeunes des favelas un moyen de sortir de la rue . Il en a financé les charges et le salaire des moniteurs, mais au bout de deux ans le groupe n’a plus reçu d’argent. Les maîtres ont continué à s’investir bénévolement, maintenant les contacts avec le réseau en place dans les différents quartiers et assurant la pérennité des échanges et activités de ces sous-groupes.

Les moniteurs recrutent les enfants dans les favelas afin de leur donner une structure et un cadre éducatif par l’entremise de ce sport de combat. Au-delà des techniques, la capoeira enseigne le respect du maître, le respect de l’autre et de ses propres limites. La pratique de la capoeira canalise l’agressivité ambiante. Certains après-midi les locaux sont ouverts à des éducateurs bénévoles qui enseignent aux jeunes d’autres matières, entre autres, l’anglais.

Nous voyons là, l’effort de certains brésiliens, souvent issus des classes les plus défavorisées, d’offrir aux jeunes la possibilité de s’en sortir par eux-mêmes sans attendre d’aide extérieure et à partir de leurs racines ethniques.

C’est un exemple de solidarité dans l’action par un investissement personnel.

Un projet en voie d'élaboration

La rencontre avec ce groupe de capoeira nous a poussé à reprendre contact avec le maître de capoeira et animateur, Monsieur Biriba, pour discuter avec lui d'un projet d'activités d'échange culturels qui pourrait avoir lieu en août/septembre 2013, avec la participation d'une dixaine de jeunes musiciens genevois. Ce projet se trouve présentement en voie de définition pour être présenté à l'assemblée générale vers la fin de cette année

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